05 avril 2023
Comment passer de prof de lycée à savonnière/ cheffe d'entreprise ?
Oui, c’est un grand écart facial. Mais je l’ai fait, et même si parfois ça tire un peu, quelle fierté, cette beauté du geste! Mon parcours, au départ, est celui de beaucoup de premiers de la classe: filière générale, hypokhâgne, khâgne, université, Capes, Agrégation -> prof.
Tant que rien ne te force à te spécialiser, tu continues sur le toboggan de ta réussite. Jusqu’à ce que, sans t’en rendre compte, tu te retrouves un vendredi soir à devoir tenir en haleine 36 ados de 15 ans avec une vidéo sur El Gordo de Navidad (oui j’étais prof d’espagnol. LV2. La priorité de PERSONNE). Tu te sens un peu inutile, ce vendredi soir-là.
Pendant 14 ans, ce sentiment devient quotidien, et t’use. Tu as choisi ce métier parce qu’il était aligné avec tes valeurs de transmission, de service public, de culture.
De là, tu échafaudes un plan. Tu développes des skills à côté du métier qui te fait vivre mais qui te fait aussi mourir un peu. Un exemple de compétence au hasard? Faire des savons. Tu es à l’affût de toutes les portes de sortie possibles. L’Education Nationale est une cage dorée (pas à l’or fin 18 carats, par contre, car l’indice salarial est gelé depuis le premier voyage de Christophe Colomb). Il y a la sécurité de l’emploi. Il y a Juillet. Il y a Août. Et toutes les vacances scolaires.
Tout pour que tu restes. Mais l’accompagnement à la mobilité, à la formation, à la reconversion est inexistant. L’Etat a investi sur toi, il ne veut pas te voir AILLEURS que devant ces 36 ados réfractaires à tout exercice de compréhension orale.
Un jour, à force d’avoir des antennes, tu saisis l’opportunité. Il m'a fallu 12 ans.
Pour moi, ça a été la décision de choisir l'entrepreneuriat pour construire ma propre sortie de secours. Jeremy Emsellem était lui aussi à l’affût d’un projet artisanal, nos planètes se sont alignées et on a dit ✨BINGO!✨ Avec mes skills extra-scolaires de savonnière, notre vision d’une cosmétique saine et belle, on a monté Ciment.
Depuis, je me sens alignée avec mes valeurs, mon équipe, et je suis heureuse d’aller bosser le matin. Alors, oui, parfois ça tire, l’entreprenariat est loin d’être un chemin bordé de roses, mais quelle fierté quand ça touche le sol, jambes tendues!
Solène Lebon